Description physique

Excentrique. J'entends toujours ce mot pour me définir. Pitié.

Je ne suis qu'une jeune femme qui a arrêté de grandir. J'ai dix-huit ans et pourtant j'en fais quinze. Pas seulement par la taille, mais disons que l'on commence à me voir lorsque je lève haut les bras. Je ne me suis jamais défaite de la rondeur de mon visage et de mes grands yeux bruns enfantins. J'essaie de le cacher derrière une coupe au carré. Ma frange réussit à me donner quelques années de plus.

J'ai pris un peu de poids ces derniers mois. Normalement, l'anorexie est derrière moi.

J'ai fait des choix, qui sont là pour que je sois moi. Je veux être le verre à moitié plein. Un bonbon acidulé, comme mon père aime à m'appeler. Je change mes couleurs au gré de mes humeurs. Vert pomme, jaune canari, bleu ciel. J'invite la nature à se refléter à travers moi. Cheveux, lentilles, vernis, vêtements, je n'ai pas de limite pour mettre les couleurs en avant.

D'ailleurs j'ai un cerisier en fleur tatoué sur le dos et tout le bras.

Caractère du personnage

J'ai toujours eu tendance à dire que je vivais dans mon monde. Vous savez ce que c'est, quand on se sent étrangère de tout. On s'enferme dans une bulle que l'on appelle notre monde. Ma mère dit que mon monde est le même que le sien, que celui de tous les autres. Seuls mes yeux sont différents.

Les gens aiment m'attribuer toutes sortes de noms peu flatteurs : je suis une rêveuse, je suis une naïve, je suis une marginale. Je ne me suis jamais pensée ainsi. Je ne me suis jamais rien attribuée en fait.

Je m'isole car on m'isole. J'observe car on m'observe. Je juge car on me juge. Je ne suis rien d'autre que ce que l'on a fait de moi. La solitude m'accompagne car l'on m'a attribué la solitude comme seule amie.

Le monde est beau. Voilà ce que je vois. Tout ce qui m'entoure m'emplit de joie. Mais tous ceux qui m'entourent me troublent d'effroi. Je regarde les nuages et je vois le soleil caché derrière. Le monde est beau et ceux qui l'habitent ne le méritent pas. Voilà ce que je vois.

J'aime écouter ma tête. Pas celle des autres. Si je veux danser je danse. Si je veux chanter je chante. Si je veux être bleue, rose ou blanche, je le suis alors.

Je ne suis pas naïve. Je ne suis pas rêveuse. Je ne suis pas optimiste. Je suis. Et je me contente d'être. Contentez-vous d'être, plutôt que de vouloir être. Le jugement que l'on m'a toujours porté est une prison que l'on a érigé tout autour de moi. On m'a enfermé pour me voir me débattre.

J'aime sourire. J'aime rire. J'aime tout ce que je fais. Arthur a dit une fois que j'étais un soleil de poche. Partout où l'on m'emmenait la lumière brillait.

Je ne sais pas. Arthur dit de belles bêtises des fois.

On me croit excentrique. Trop de couleurs. Trop de gaieté. Je brûle les yeux à être ce que je suis. Mais je ne suis pas pour que l'on me regarde. Détournez les yeux, il y a tant d'autres choses à admirer.

Pourtant croyez-le bien, je ne suis pas un monstre coloré. Venez me parler et vous verrez, je ne fuirai pas pour m'isoler.

Histoire du personnage

On était là, tous les deux, autour de deux milk-shakes trop gros pour nous. Enfin surtout pour moi. Je n'y avais pas touché, mais je savais qu'Arthur avait claqué le peu d'argent qu'il avait pour nous offrir ça. Et il le savait aussi. C'était un piège. Il savait que je me forcerais à l'engloutir pour ne pas gaspiller. Il me fixait d'un air intrigué, affalé sur la table comme à son habitude, la paille dans la bouche.

– T'es bizarre quand même, hein ? lança-t-il de nulle part.
– Euh... sans doute. Enfin je sais pas. Pourquoi tu me dis ça maintenant ?
– Quelque chose me disait que c'était le bon moment.
– Et c'est moi qui suis bizarre, soupirai-je exaspérée.

Il se redressa de toute sa hauteur, bien qu'il ne soit pas plus grand que moi. Je crus une seconde qu'il s'était offensé, mais ce n'était clairement pas son genre. Arthur ne prenait rien au sérieux. Toute sa vie n'était qu'une succession de prises de risque, de sans lendemain, de sans conséquence. Des poings dans la gueule, des vols à la tire, des resto-baskets, voilà ce qu'était Arthur. Il ne se vexait jamais, n'était jamais de mauvaise humeur. Ou l'était perpétuellement, difficile à dire en fait.

Quant à moi...

– Non mais t'as une vie mouvementée quoi. Tout le monde se fout de toi et...
– Comment ça tout le monde se fout de moi ?
– Non mais j'veux dire... T'es pas normale quoi.
– Merci, Arthur.
– Les gens ils aiment pas ça et ils se cachent pas pour l'montrer. Pleure pas Bébé, au moins ça te fait une vie... intéressante, conclut-il en prenant une longue gorgée de sa boisson.

Ma vie n'avait rien d'intéressante ou de dingue. Elle était même plutôt ennuyeuse. En vérité, c'était Arthur qui rendait ma vie mouvementée. Moi, je n'étais qu'une fille unique née d'un père et d'une mère qui s'aimaient. J'avais un toit que je fuyais souvent, une assiette à laquelle je ne touchais presque jamais, j'avais grandi entourée de personnes qui me rejetaient. Lui, il n'avait pas connu son paternel, vivait avec quatre frères et sœurs plus jeunes dans quarante mètres carrés, et sa mère galérait à subvenir à leurs besoins. Pourtant c'était lui qui tenait toujours debout. Lui qui ne s'était jamais effondré. Au contraire, il m'avait sout...

– Qu'est-ce que tu fous ?
– De quoi ?
– J'sais pas, tu regardes dans le vide sans répondre, c'est flippant !
– Pardon, j'étais en plein introspection.
– Tu peux introspecter quand t'es toute seule, non ?

Voilà, c'était ça Arthur. Rien ne laissait place à l'imagination dans son esprit. Je n'avais jamais connu quelqu'un d'aussi terre-à-terre, uniquement focalisé sur la réalité. Car celle-ci était dure, et Arthur en faisait les frais jour après jour. Là-dessus, nous étions diamétralement opposés. Il était un peu une ancre pour moi, qui me retenait au monde. Et moi j'étais une fenêtre pour lui, d'où il parvenait à s'échapper, à prendre une bouffée d'oxygène.

– Tiens au fait ! ajouta-t-il en fouillant dans une poche de sa chemise délavée, pour en sortir une dent recouverte d'un sang séché depuis plusieurs heures.
– Range ça, c'est dégueulasse !
– Tu veux pas un souvenir de ton ex ?
– Quand je pense que t'es allé lui péter une dent, ça va encore me retomber dessus ! comme chaque fois qu'Arthur entreprenait la moindre chose d'ailleurs, c'était moi qui en faisait les frais.
– J'en ai pété deux et demi en fait, une pour chaque personne qu'elle est allée se taper.
– Et la demi, alors ?
– Elle m'a envoyé ses nichons en photo une fois. J'te l'avais pas dit ?
– C'est une blague ?
– Tu l'avais pas lu dans tes cartes ça, hein ?
– Va chier.

Voilà à quoi ressemblait ma vie. Solitaire depuis ma plus tendre enfance, j'avais appris à vivre sans les autres parce que les autres ne savent se nourrir que de souffrance. C'est épuisant. J'ai passé ma scolarité à subir et à fuir. Ça m'a détruite et aujourd'hui, je n'avais aucune envie de refoutre les pieds dans la moindre école. Je n'étais pourtant pas misanthrope. Je dirais même que j'aimais les gens, indépendamment les uns des autres. Car ensemble, ils devenaient une simple meute de charognards.

Cette dent n'était pas la première qu'Arthur arrachait pour moi. En fait, elle n'était que la dernière pièce d'une très large collection. Depuis la maternelle c'était lui qui me protègeait, ce crétin. Il n'avait pas d'autre ami parce qu'il préférait affronter le monde entier de ses poings plutôt que le laisser me faire le moindre mal. J'avais souvent pleuré par reconnaissance. Et lui se foutait de ma gueule. Car si ses mots étaient souvent durs, son comportement blessant, sa manière de me protéger était pour lui tout aussi naturel que respirer pour vivre.

Cette histoire d'ex n'était qu'un exemple de ce que le monde avait à m'offrir : rien de plus qu'un bon gros foutage de gueule. J'avais trouvé quelqu'un d'autre avec qui tout partager, ça avait été une belle histoire de trois ans. Et voilà que j'apprends qu'elle se tapait les mecs de sa classe, en faisait des sextapes ou envoyait des nudes à mon meilleur pote. La vie au lycée. Quelle galère. Moi, je n'étais finalement que l'expérience lesbienne à cocher dans une liste de choses à faire.

– D'ailleurs, c'est quand que j'vois les tiens, de nichons ?
– Tu les as déjà vus, soupirai-je, car j'avais l'habitude de ses provocations.
– Ils avaient même pas encore poussé, ça compte pas. Qu'est-ce que t'as ? ajouta-t-il sans marquer de pause.
– J'ai quoi ?
– Tes yeux là. Tu chiales encore, lopette ? dit-il d'un ton sévère.
– Laisse-moi chialer, pauv' con, répliquai-je vexée, en détournant le regard.

C'était comme ça qu'on parlait entre nous, depuis toujours. Ça nous a valu de belles punitions d'ailleurs.

– On peut partir ? Genre aller au parc ?

Bien sûr qu'on allait y aller. Arthur ne me disait jamais non.

C'était ma manière de fuir les problèmes depuis toujours : une étendue d'herbe, l'ombre d'un arbre ou une clairière silencieuse. Mes parents avaient passé de longues heures de mon enfance à hurler mon nom, à me chercher et à s'inquiéter. Parce que j'avais fugué dans le jardin, sous les massifs de fleur. Mon corps était  toujours là pourtant, mais c'était mon esprit qui partait vagabonder. J'étais sur des planètes étrangères avec les histoires que je me créais. Dans ma tête vivaient des centaines de personnages, tous avec leurs caractères, leurs passés, leurs joies et leurs peines. Je leur créais de belles aventures, celles que je n'avais jamais pu vivre, celles que je ne vivrais jamais.

C'était probablement ces milliers d'histoires qui m'avaient poussé dans les arts plastiques. Pas seulement le dessin ou la peinture, mais surtout la sculpture, la construction. Depuis toute petite, il fallait que je fasse vivre ces histoires car elles avaient été plus importantes pour moi que la vie que je traînais au quotidien. Ma mère aimait dire que j'avais eu de la pâte à modeler en main un jour, et que je ne l'avais plus jamais lâché. Je modélisais des mondes de mes mains, c'était comme ça que je m'évadais.

– Arthur ? soufflai-je une fois que nous étions installés dans l'herbe, à l'ombre d'un massif de chèvrefeuille à l'odeur apaisante. Je regardais défiler le peu de nuages que le ciel d'été nous offrait. Tous deux allongés, il avait sa tête proche de la mienne et grogna pour toute réponse. Qu'est-ce qu'on fout là ?
– C'est toi qu'as voulu venir, B., murmura-t-il d'une voix endormie.
– Pas là dans l'herbe ! Là... là. Pourquoi on ne lâcherait pas tout, maintenant que j'ai fini le lycée ? On s'envolerait quelque part, partout.
– Tu voudrais aller où ?
– Ailleurs. Tu sais... Juste... ailleurs.
– Les gens seront les mêmes ailleurs.
– Je sais, Arthur...

Encore un soupir et je me tournai pour être dos à Arthur. Je ne voulais pas qu'il voit que je pleurais. Encore. Je n'étais pas toujours cette fille fragile. Je traversais juste une mauvaise passe. Enfin je crois. Je contemplais d'un œil envieux les nuages avancer au gré du vent, et les oiseaux voler sans contrainte. Je me serais bien vue, là-haut. Sans limite. Parce que vivre, ça se devrait d'être une sacrée belle aventure.

– Je sais.

Hors-RP

Pseudo : Natte
Autres comptes ? Le vieux Gègène a subi une mitose !
Comment as-tu découvert le forum ? Bah je suis là depuis quelques mois quand même !
Autre chose ? Je vous aime et j'espère que Billie et Arthur vous plairont, ce sont mes bébés.